Patrick Beurard-Valdoye
Skjolden : Ludwig Wittgenstein
Skjolden : Ludwig Wittgenstein
1
L’EMBARQUE glisse sur le lac glaciaire
traversé par l’Eid sa rivière
— libre cours aux écritures
wasserfalls en surplomb —
le rameur déniche une écorce d’amarrage
gravit quelque rustre sente scarpétroite
varappe granit par granit varappe
l’abîme disposée tout au faux-pas
fruit d’efforts dépassant les bouleaux
il s’élève à Østerrike
sa vue plonge sur l’Eidsvatnet
les remparts lapidaires closant le monde
dont le fjord hors de vue
la combe en fond est l’issue
le lac à truites crevé
le vert-lait du lexique d’ici
plain-reflet plein de reliefs
tout se tait mais nul volatile
beauté écrasante habitant l’abîme
2
Le rocher de la hutte
voyait loin entre deux bouleaux
: Ici c’est ici si j’y suis
il marmonnait l’inaccès
il luttait pas à pas pour que folie
ne souille raison : quelle vérité
dans le désert d’homme
génufléchi il dit : Il n’y a personne ici
pris du sentiment d’avoir énoncé l’essentiel
l’Autrichien — l’appelaient les villageois —
lunatique sérieux autant que colérique
était gouverné de manière étrange
il combattait entre mi-ciel et mi-enfer
fjord salé tout contre lac d’eau douce
dans ce monde fait d’événements
l’événement du printemps c’était
le premier rais de soleil pénétrant la hutte
sans le temps du déçu
3
La hutte des pensées demeura hermétique
on profita de la glace du lac
pour la descendre la déconstruire
la déformer détourner son toit
un soir sans brouillard
le wasserfall ensoleillé se reflétait
dans le vert de lait quand le rameur
estropié par la dégringolée
estima que la pensée représentait un risque.