Nicole Brossard
Villes sans nom
Villes sans nom
quand la réalité déferle
tu dis villes sans nom
arbres soudain trop grands
pour ta mémoire d’enfance
dans ton regard toujours
un présent d’absence déjoue
tes intentions les plus fleuves et rondes
villes parce qu’on est sincère
avec nos ombres de nouveau monde
enfoncées dans le temps et le sentiment
villes pleines de nos odeurs de fin du monde
avec leurs bûchers, leurs veuves
leurs ponts et fleuves d’encre
villes quand quelqu’un te bouscule
dit sorry à cause du bruit et de la pluie
s’empare à bras-le-corps
d’une mélodie pour soulever le présent
son parfum fort de changement qui fascine
tous les matins quand même
tu la vois notre humanité bras ballants
sans oxygène au milieu de ses débris criants