Louise Dupré 
Translator

on Lyrikline: 6 poems translated

from: alemán, inglés, húngaro to: francés

Original

Translation

Die Sprache gibt den Löffel ab

alemán | Orsolya Kalász

                    für Verena Kammerer

Wer kommt in meine Sprache?
Frag ich dich
frag du mich
du Schlaflose.
Komm
frag mich doch, du mich doch, ich dich dann wieder.
Gibt es das Tor in deiner Sprache
das auf mein Herzklopfen sich öffnet?
Hör mich doch, du mich doch, ich dich dann wieder.
Was können die Tränen in deiner Sprache?
Was können  Tränen in deiner Sprache
wenn ich von der
Rebe
der Rebe des Weinen
die salzigen Trauben
heimkarre
und sie
auf dein Gesicht lege
läßt du sie dann rollen, rollen sie in deiner Sprache?
Frag ich dich, frag du mich, du mich doch, ich dich dann wieder.
Wollen sie heim
die erratenen Worte
heim in die Dämmerungsanstalt?
Was mußt du dann abgeben, du in deiner Sprache?
Du, den Löffel.
Ich, ich in meiner Sprache den Schlüssel.
Da liegen noch ein paar Vergleiche im Keller.
Ich bin schuld! Du bist schuld!
Wer ist schuld!
Die verdammten Ratten sind schuld!
Frag du mich, frag ich dich, du mich doch, ich dich dann wieder.
Was erwartet die Hand in deiner Sprache?
Ich hatte ihren Kopf, einen an jedem Arm
damit ließe sich etwas anfangen
anfassen, umarmen.
Dir zeigt sie nur ihre Kehle
die Handkehle.
Was kann eine Kehle
außer singen, oder schreien
einschießen in die volle Traube.
Dann sing eben, sing, schrei, verschluck dich
schluchze, röchle
speie die Kummerbrocken
auf ein weißes Blatt:
Ein Bild. Ein Mädchen und eine Wildgans. Die Gans hat ein Bein hochgezogen.
Das Mädchen lehnt den Kopf an ihren dünnen langen Hals.
Wer kommt in meine Arme
hör ich dich, mich, hör du mich
hör doch
die erratenen Worte
haben das Herztor aufgestoßen
die Trauben
zertreten, zertreten, zertreten


Laß uns tauschen
gib mir den Löffel
nimm du den Schlüssel.

© Orsolya Kalász

LA LANGUE PASSE L'ARME À GAUCHE

francés

              pour Verena Kammerer

Qui vient dans ma langue?
Je te le demande
demande-le-moi, toi
toi l'insomniaque.
Viens
demande-le-moi donc, toi à moi donc, et puis moi à toi ensuite.
Y a-t-il une porte dans ta langue
pour frapper à la chambre de ton cœur?
Écoute-moi donc, toi moi donc, et puis moi toi ensuite.
Que peuvent les larmes dans ta langue?
Que peuvent des larmes dans ta langue
quand je ramène dans la brouette
de la vigne
la vigne des pleurs
les raisins salés
et les
pose sur ton visage
les laisses-tu rouler alors, roulent-ils dans ta langue?
Je te le demande, tu me le demandes, toi à moi donc, et puis moi à toi ensuite.
Veulent-ils rentrer chez eux
les mots devinés
rentrer dans la nuit de leur asile?
Qu'est-ce que tu dois faire pour mourir, toi, dans ta langue?
Toi, tu passes l'arme à gauche.
Moi, moi dans ma langue je rends la clé.
Il y a encore quelques comparaisons dans le placard.
Je suis coupable! Tu es coupable!
Qui est coupable?
Les maudites mites sont coupables!
Tu me le demandes, je te le demande, toi à moi donc, et puis moi à toi ensuite.
Qu'attend la main dans ta langue?
J'ai une paume au bout de chaque bras
ça peut toujours servir à quelque chose
à toucher, à embrasser.
Elle te montre seulement sa gorge
la gorge de sa main.
Que peut une gorge
à part chanter, ou crier
monter dans toute la grappe de raisin ?
Eh bien chante alors, crie, étouffe-toi
chiale, râle
crache le chagrin en morceaux
sur une feuille de papier blanc:
Une image. Une petite fille et une oie sauvage. L'oie a levé la patte.
La petite fille pose sa tête contre le long cou mince.
Qui vient dans mes bras?
Je t'entends, je m'entends, entends-moi
entends donc
les mots devinés
ont ouvert la porte du coeur
les raisins
piétinés, piétinés, piétinés


Faisons du troc
donne-moi l'arme à gauche
et toi prends la clé.

traduction de Louise Dupré
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007

Wenn du deine Finger aus der Erde ziehst

alemán | Orsolya Kalász

für Stevan Tontic


Warum willst du einen Garten
mit hohen Mauern?
Warum soll dich dort niemand sehen?
Du hast noch nie fremde Stimmen im Kopf gehört.
Niemand velangt von dir,
daß du Reue zeigst.
Und wer sollte dich nach dem Wort Trauergras fragen.
Warum glaubst du keine andere Wahl zu haben
als jenen Garten zu finden und dort
deine Finger in die Erde zu graben
und zu warten, daß das Trauergras
in die Tiefe sprießt.
Wirst du deine Finger aus der Erde ziehen,
werden deine Nägel schwarz umrandet sein.
Zehn taube
Zehn stumme und blinde
Trauergestalten.
Eine andere Hand war es
die jene Zeile schrieb:
"Mein Herz versinkt in einem Brunnen, das keinen Boden hat."

© Orsolya Kalász

SI TU RETIRES TES DOIGTS DE LA TERRE

francés

Pour Stevan Tontic


Pourquoi veux-tu un jardin
avec de hauts murs?
Pourquoi veux-tu que personne n'ait le droit de te voir?
Tu n'as encore jamais entendu de voix étrangères dans ta tête.
Personne n'exige de toi
que tu montres du regret.
Et qui pourrait te demander des précisions sur le mot herbe du deuil?
Pourquoi penses-tu n'avoir d'autre choix
que de trouver ce jardin
pour y enfoncer tes doigts dans la terre
et attendre que l'herbe du deuil
pousse dans les profondeurs ?
Si tu retires tes doigts de la terre,
tes ongles seront cerclés de noir.
Dix silhouettes en deuil
sourdes
muettes et aveugles.
C'est une autre main
qui a écrit :
« Mon cœur sombre dans un puits sans fond. »

traduction de Louise Dupré
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007

Orphic Hymn

inglés | Tim Lilburn

It salmons from leagues of leafmulch

and wrings to the door.

Oak leaf shadow craters its spine range and neck

as if it walked between being’s lit breasts and the screen.

It’s got caught, opened in its antlers, the wood covered 16th century book

that works out I am sick.

I hold this up to what I am doing, lying on the divan, haven’t pissed

or shit in days, infection’s horse’s rider lashes back and forth

with his black flag. Two winter stars with dessert plate heads

two months ago were nailed at either edge of my groin.

I’ve been pensioned a shield of bees

below my chin, under earliest skin, a bridge, a sleeve of industry.

The MRI tech asked if I like country or classical.

The dogwood tree blooms in the full window a rising whine.

The temperature of this settles in like sediment that’s already stone.

A knife waits, girlish, down the hill, flipping over, over,

small fish flash at the bottom of that boat, convinced, crossing

and uncrossing its legs.

© Tim Lilburn
from: unpublished
Audio production: 2007, Literaturwerkstatt Berlin

Hymne orphique

francés

Elle surgit, comme un saumon, de lieues de lits de feuilles
et geint à la porte.
L’ombre d’une feuille de chêne creuse la crête de ses vertèbres et de son cou
comme si elle marchait entre les seins illuminés de l’être et l’écran.
Il s’est laissé prendre, ouvert dans ses ramures, le livre du XVIe siècle
couvert de bois
qui me montre que je suis malade.
Je tiens en main ce que je dois faire, étendu sur le divan, sans avoir pissé
ni chié depuis des jours, l’infection, ce cavalier qui va et vient tel un fouet
avec son fanion noir. Deux étoiles d’hiver, deux têtes d’assiettes à dessert
ont été clouées il y a deux mois de chaque côté de mon aine.
J’ai reçu comme pension un bouclier d’abeilles
en bas du menton, sous la peau, un pont, un bock artisanal.
Les techniciens de l’IRM* m’ont demandé si je préférais le country ou le
classique.
Le cornouiller fleurit dans toute la fenêtre, plainte montante.
Cette température s’installe tel un sédiment qui déjà est de la pierre.
Le couteau attend, comme une jeune fille, en bas de la colline, frétillant
encore et encore,
petit poisson luisant sous la coque de ce bateau, convaincu, fermant
et ouvrant les jambes.

* Sigle pour l’appellation « Imagerie par résonance magnétique».

traduit par Louise Dupré,
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007

Getting Sick

inglés | Tim Lilburn

I dug a slot into no address,

I dug a slot warm as a hand into the water of the air.

The eye seeing me is a charred-wood backed river cannonballing

through badlands      badly disciplined, lizardly hills, water in mitres

of cinder freighting necessity’s weight past my head on the ground sleeping,

the eye’s windy mouth, love-yanked love wall; pines triple axel in it.

Coal-masked generosity, no name.


*

Two years we were stubbed on the floor, bone-eared, smoke-cheeked.

Urgency, in a torn gown, held my chin between its thumb and index finger

and unreined its face lunging

into my face, its face a foot from mine cataracted, and said

a single word a day from a pack of ten.

I put my finger in its mouth, and, then, sick, was triaged

up barely blacksmithed, leprechaun, lignin creeks

that were unloading the hills,

its nose a foot from my face,

bonemeal, burnt wire creeks,

flicker of antler, thinlipped cat, graphite dust, no cartilege

creeks, I followed them up, with a bag of burnt sand, bag

of swung sticks, pushed in shopping cart, building materials for the very

top, the static of Europe bulging my knee.

I dug a slot into no address,

my knee geigered a snailheaded ghost, an unread Chaldean library

            below the hover of Plato’s soul.

In small stones houses, violet field were artillerying from a century ago

under the floors.

© Tim Lilburn
from: unpublished
Audio production: 2007, Literaturwerkstatt Berlin

Devenir malade

francés

J’ai creusé un trou dans le gravier sans adresse.
J’ai creusé un trou comme une main dans la moiteur de l’air.
L’oeil qui me voit est un fleuve, une surface de bois carbonisé, un boulet de
canon
à travers les mauvaises terres mal disciplinées, les collines lézardées, l’eau
dans les mitres
de cendres charriant le poids de la nécessité au delà de ma tête endormie
sur le sol,
la bouche venteuse de l’oeil, le mur de la nuit frappé d’amour ; là où tourbillonnent
les pins.
La générosité charbonneuse, sans nom.


*
Deux ans que nous étions écrasés sur le sol, les oreilles ossifiées, les joues
enfumées.
L’urgence, dans une robe déchirée, a tenu mon menton entre son pouce et
son index
et a lâché son visage fou
en direction de mon visage, à un pied de mon visage en torrents, et a tiré
un mot seulement d’un paquet de cartes.
J’ai mis mon doigt dans sa bouche, et puis, malade, j’ai été dirigé,
à peine forgé, vers des ruisseaux de bois, lutins,
qui se déversaient des collines,
son nez à un pied de mon visage,
de l’engrais d’os, des ruisseaux comme des fils brûlés,
une lueur de ramures, un chat aux lèvres minces, de la poussière de graphite,
aucun ruisseau
de cartilage, je les ai suivis, avec un sac de sable consumé, un sac
de bâtons durs, poussé dans un panier de supermarché, des matériaux de
construction
pour le sommet, les bruits parasites de l’Europe enflant mon genou.
J’ai creusé un trou sans adresse,
mon genou a détecté un fantôme à tête d’escargot, une bibliothèque chaldé-
enne non fréquentée
sous les voltiges de l’âme de Platon.
Dans de petites maisons de pierre, les champs de violettes lançaient des
sons d’artillerie du siècle dernier
sous les planchers.

traduit par Louise Dupré,
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007

Futur II

alemán | Orsolya Kalász

Auf den gelenkigen Rücken
junger Hunde
jagen
vor unseren Augen
jene Momente
des Glücks
über die Parkwiese
die wir einst
gehabt haben werden.

© Orsolya Kalász

FUTUR ANTÉRIEUR

francés

À cheval
sur de jeunes chiens
galopent
devant nos yeux
dans l'herbe du parc
ces moments
de bonheur
que nous allons autrefois
avoir vécus.

traduction de Louise Dupré
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007

Egy mondatban

húngaro | Orsolya Kalász

Az a lázas bűvölet, amely
Marokkó köves sivatagában
leheletvékony szemeteszacskók
lélektáncát látta
nem tűri meg
hogy ellene szavaid
megbocsássam.

© Orsolya Kalász

EN UNE PHRASE

francés

Cette fiévreuse extase
qui voit
dans le désert de pierre
marocain
des sacs de déchets très minces
danser comme s'ils avaient une âme
rend tes moqueries
contre eux
on ne peut plus impardonnables.

traduction de Louise Dupré
Versschmuggel, Poesiefestival Berlin 2007