Pierre Lartigue
Voyages
Voyages
Le voyage commence avant, bien avant les voyages, dans une maison
grande comme une boîte d’allu-mettes, avec des odeurs de sel, d’immortelles,
le carrelage brisé devant la cheminée. Rumeur au creux des coquillages.
Armurier de marine, mon grand-père habitait à côté.
J’entends le bruit d’un pas la nuit: le mien. Je me lève attiré par la tiédeur du
terrain sableux où je creuse un tunnel pour ressortir à l’autre bout du monde.
Là nous irons la tête en bas ! La nuit est pleine d’étoiles. La mer monte. La
lune éclaire mes travaux. Ainsi, pendant des jours, je fouillai un sable de
plus en plus humide et de plus en plus pur jusqu’à tomber sur une nappe
d’eau, saumâtre, grise.
Il me fallut chercher plus tard une autre voie. Plusieurs pistes s’offraient en
étoile : pirate ou pèlerin ? Pirate des livres dont les pages reçoivent le vent
comme des voiles ? Ou pèlerin d’encore, du plus lointain et du plus bleu ?