Paul Bélanger
Le passeur du palais des ombres
Le passeur du palais des ombres
On n’imagine pas la joie d’être dans une chambre, malgré le poids de la dépression qui pèse de partout. Tellement de joie dans la chambre. L’ombre moirée échue d’une lumière crue, comme l’amertume jamais saisie d’un fruit. Ou jamais cueillie. Appel reconnu entre mille,que je ne reconnais pas. Une seule voix échappée de la nuit. Elle ouvre sur le dehors prodigieux et multiforme. Elle contient le génie de cette luminosité qui efface tout. Soudain le monde devient autre. Un paysage est généré et la création de cet espace infini se heurte à ma volonté. Pour un voyageur spirituel, rien n’égale ce sentiment d’un lieu éprouvé. Un port suffit, duquel partir pour aller vers l’« indéfini ». L’aventure d’une écriture est celle d’une vie, d’un navire coincé dans les rets des vagues. Tant le corps s’épuise en vains recommencements, tant le chemin de la langue et de la mémoire dispose ses allées à perte de vue. Toute vérité a son masque, tout masque sa vérité. L’utilité de l’oubli, quand une telle approche maintient l’homme à distance, est que plongeant dans cet abîme, il remarque l’horizon de sa chute. Cet inconvénient, il le nomme naissance.