Pierre Lartigue

französisch

Sextine

Suffit-il avoir de l’esprit jusqu’au bout des doigts ?
Ouvre la bouche : sens comme la parole tremble !
Elle est trop légère et ne laissera pas de trace.
Pentes voici l’automne. Nous sommes là pour voir
Une prairie – rares coquelicots parmi – flam-
Més, haricot, sang de bœuf ! Le souvenir déroule


A nos yeux son long manuscrit muet. Bruit des roul-
Eaux dans les roches, la mer comme un lait sur les doigts,
Il veut la dire et il s’éloigne avec les flammes
Hautes, les grandes marées, les roses, tout un tremble
Ment-vertige-malice-ensemble : « Il nous faudrait savoir
Attendre le retour : ce cœur par milliers de traces,


Il sera l’eau sous la dent du caillou ». Je retrace-
Rai l’u des ruisseaux. Chaque strophe comme un dé roule-
Ra vers la mise : salive, jeu, sourire d’avoir,
(O tout ce qu’il aimerait tenir entre ses doigts
Rongés !). Tu ne possèdes que ta langue ! Tremble
A l’heure où peu à peu cligne la dernière flamme,


Enfonce-toi dans les ombres, sentir le souffle à m-
Eme ton cou, comprendre alors que chaque lettre a s-
A qualité rare – la couche noire des sureaux trembl-
Ant dans la nuit – savoir la phrase comme un déroule-
Ment d’encre en nous qui s’écrase buissons, boue, ardoi-
Se éclatée, coquilles. Tant de choses dans la voix r-


Emuent ! Lève doucement les yeux. Ecoute voir
Ces limonades, ces étoiles douces, ces flammes
Qui sautent. Dans la loge d’ombre où tendre tes doigts :
« Rien que la langue » disais-tu « bouche sans trace
Jamais sûre d’elle, même dans le cri ». Déroule
A plat le manuscrit de façon que rien ne tremble !


Poème propre sur la pâte de bois de tremble,
Il est là si bien copié qu’on ne peut plus y voir
Une lettre tachée. Les brouillons, on les déroule,
On les bouchonne avec les enveloppes, les flammes,
Les timbres oblitérés. Chacun froisse les traces
De ce qui glissa comme une ronde entre tes doigts.


A l’extrême des doigts plusieurs allumettes tremblent
Du désir qu’une trace écrite s’annule. Voir
Comme la mince flamme s’enroule, se déroule…

Cette sextine conclut Ce que je vous dis trois fois est vrai, 1984 (Aujourd’hui épuisé)

© Pierre Lartigue
Aus: unpublished
Audioproduktion: Printemps des Poètes 2006

Sestine

Genügt der Witz bis in die Fingerspitzen?
Mach deinen Mund auf: die Worte zittern.
Sie sind zu leicht, es bleibt keine Spur.
Herbstliche Hänge. Da ist eine Wiese zu sehn
Mit Klatschmohn, rot wie Flammen,
Bohnen, Ochsenblut! Erinnerung entrollt

Vor unsern Augen stumme Schrift. Es rollt
Die Brandung, wie Milch das Meer an den Fingerspitzen.
Er wills beschreiben, geht weg mit den Flammen,
Den Wogen, den Rosen, trotz Zittern
Und Schwindel und Spottlust: „Das Wiedersehn
Wäre abzuwarten: das Herz mit tausendfacher Spur

Wird Wasser sein unterm Stein.“ Ich zeichne die Spur
Des Baches nach. Wie ein Würfel rollt
Jede Strophe zum Einsatz: Speichel, Spiel, Gewinn sehn
(So vieles hielte er gern zwischen den Fingerspitzen!)
Du hast nur deine Zunge! Da magst du zittern
Beim allmählichen Erlöschen der letzten Flammen,

Sink hinab in die Schatten, spür den Atem, wie Flammen
Heiß am Hals, begreife, wie selten die Spur
Jedes Buchstabens, Holunderbüsche zittern
Schwarz in der Nacht, wie Tinte entrollt
Sich der Satz in uns, zerdrückt den Schlamm, die Spitzen
Der Sträucher, den Schiefer. So viele Dinge in der sehn-

Süchtigen Stimme! Blick langsam auf. Wie Arsen
Die Limonaden, und milde Sterne, zuckende Flammen.
Wohin bewegen sich im Dunkel deine Fingerspitzen:
„Nur die Zunge,“ sagtest du, „Mund ohne Spur,
Auch im Schrei nicht sicher seiner selbst.“ Da entrollt
Sich das beschriebene Blatt ohne jegliches Zittern!

Gedicht, ins Reine geschrieben auf Papier aus der zittern-
Den Pappel, so sauber, keinen Fleck hinterließ die sehn-
Ige Hand. Die Entwürfe werden zuerst entrollt,
Dann mit Umschlägen und Briefmarken in die Flammen
Geworfen, und jeder verwischt die geringste Spur
Was du nicht halten wolltest zwischen Fingerspitzen.

Streichhölzer, mit spitzen Fingern gehalten, zittern
Vom Wunsch, daß die Spur, die geschriebene, verschwinde. Zu sehn
Ist, wie die kleine Flamme noch einmal sich zusammenrollt...

(Diese Sestine ist der letzte Text des jetzt vergriffenen, 1984 erschienenen
Buches Ce que je vous dis trois fois est vrai (Was ich euch dreimal sage, ist
wahr
).

Übertragen von R. Fischer

©Printemps des Poètes