Paul Bélanger
Replis, chambre de l'arpenteur
Replis, chambre de l'arpenteur
Il voulait devenir l’homme-livre, qu’advienne, disait-il, l’air du temps, la faille fantastique, qu’advienne chaque jour le livre attendu, impossible;
un vrai temps de liberté, même s’il n’y croyait plus, désiré tout au moins, qu’il devienne ce corps, il espérait toutefois une histoire de ses jours décomposés dans l’humble repli de sa solitude;
qu’advienne le moment du jour dépassé, brûlé par le livre, une vie comme la sienne, remémoré, le temps d’un homme de passer et ce passage qu’il donne.
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Il vivait donc reclus, marchant de long en large dans le salon, dans sa chambre, tant d’histoires dormaient;
l’ouverture terminée, cette chute où sa vie se brise, car le monde est sur sa fin : désolation, faim, crimes, tant de larmes tandis que son lieu s’érige dans la marge, banquet où les personnages attendent l’élégie du retour;
chacun murmurait sa phrase végétale, Érasme dans la folie de son corps tournait le dos à l’amitié, en exil lui aussi dans cette chambre : prose de son existence.
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La chambre est claire comme l’air du soir aspirée par le rideau du vent, la bruine tiède couvre la chaise du jardin;
dans le lac noir du plancher s’engouffre le ciel, une silhouette passe, transparente à la lumière, un personnage sans identité, une ombre portée;
il brade sa peur, ocelle crevé, fonde un paysage avec cheminées et fumée, progrès –n’y pense pas;
enfermé, hostile au voyage et au marketing exotique de l’au-delà;
sans autre ressource que sa force, il se dépense dans les failles jusqu’au vertige du bois;
il connaît bien l’endroit, il rejoindra la forêt plus tard.