Maurice Chappaz
Le Valais au Gosier de Grive
Le Valais au Gosier de Grive
VI
Femmes aux pressureurs, aux laboureurs,
éraflées et moulues,
vidées d'elles-mêmes comme par les pics-verts,
ne possédant plus rien de leur vie de jeunes filles,
ayant couché avec le Valais ivrogne
à la sainte trogne porcine,
soufflant le fœhn
qui est cigare et plain-chant.
Femmes aux minces yeux myrtilles,
passées par les barbus ;
qui ont dit le grand oui
et depuis murées comme des sphinx sous la coiffe sombre.
Vérité de vérité :
elle jaillira de leur sein,
elle vaincra le monde.
Coffre puissant, bestial,
le sourire de la sagesse
et leur enfant, la parole,
pareille à une sauterelle sur la langue des muets.
Parole, bond à travers les horreurs et les pudeurs
des calvaires sur le Rhône.
Eh ! Ludivine, Marguerite, Catherine,
dites tout de vous,
dites tout du Valais sec et sombre,
femmes de vignes,
arbres de la passion,
vases de silence.
Ici est la vie,
saints des saints ;
pourceau ou saint.
Bien égal.