Paul Bélanger

الفرنسية

Nino Muzzi

الايطالية

Le passeur du palais des ombres

On n’imagine pas la joie d’être dans une chambre, malgré le poids de la dépression qui pèse de partout. Tellement de joie dans la chambre. L’ombre moirée échue d’une lumière crue, comme l’amertume jamais saisie d’un fruit. Ou jamais cueillie. Appel reconnu entre mille,que je ne reconnais pas. Une seule voix échappée de la nuit. Elle ouvre sur le dehors prodigieux et multiforme.  Elle contient le génie de cette luminosité qui efface tout. Soudain le monde devient autre. Un paysage est généré et la création de cet espace infini se heurte à ma volonté. Pour un voyageur spirituel, rien n’égale ce sentiment d’un lieu éprouvé. Un port suffit, duquel partir pour aller vers l’« indéfini ». L’aventure d’une écriture est celle d’une vie, d’un navire coincé dans les rets des vagues. Tant le corps s’épuise en vains recommencements, tant le chemin de la langue et de la mémoire dispose ses allées à perte de vue. Toute vérité a son masque, tout masque sa vérité. L’utilité de l’oubli, quand une telle approche maintient l’homme à distance, est que plongeant dans cet abîme, il remarque l’horizon de sa chute. Cet inconvénient, il le nomme naissance.

© Paul Bélanger
من: Cahier de Fernando Pessoa
Éditions du Silence, 2011
الإنتاج المسموع: Union des écrivains et des écrivaines québécois, 2013

Il passatore del palazzo delle ombre

È inimmaginabile la gioia di essere in una camera, malgrado il peso della depression che grava dappertutto. Quanta gioia nella camera. L’ombra marezzata dovuta ad una luce cruda, come l’asprezza mai afferrata di un frutto. O mai colta. Un richiamo riconosciuto fra mille che io non riconosco. Un’unica voce sfuggita alla notte. Essa apre sull’esterno prodigioso e multiforme. Contiene il genio di quella luminosità che tutto cancella. Spesso il mondo si trasforma. Vien creato un paesaggio e la creazione di questo spazio infinito si urta contro la mia volontà. Per un viaggiatore dello spirito niente eguaglia quel sentimento di luogo già vissuto. Basta un porto per salpare verso l’“indefinito”. L’avventura di una scrittura è quella di una vita, d’una nave incastrata nelle maglie delle onde. Quanto il corpo si sfinisce in vani ricominciamenti, tanto il cammino della lingua e della memoria distende i suoi viali a perdita d’occhio. Ogni verità ha la sua maschera, ogni maschera la sua verità. L’utilità dell’oblio, quando tale approccio tiene l’uomo a distanza, è che affondando nell’abisso lui nota l’orizzonte della propria caduta. Questo inconveniente lui lo chiama nascita.

Traduzione: Nino Muzzi